-
En 1927, Être et Temps éclate comme un coup de tonnerre. Heidegger y abat les deux fondements de toute la pensée occidentale : la subjectivité, avec son a priori (hérité de Kant) et son intentionnalité (venue de Husserl) ; la temporalité, avec la double primauté de la succession et du présent.
Tout au long du xxe siècle, sous le poids d’un ouvrage qui s’attribue la rigueur argumentative d’un « Traité », la phénoménologie n’est plus jamais parvenue à renouer avec sa vocation transcendantale, apparaissant sous des versions tour à tour herméneutiques, existentielles, onto-logiques, cosmologiques, naturalistes, inspirées des thématiques offertes par le texte-source.
Il est grand temps, après un siècle de lecture, de recentrer l’attention sur le tissu logique d’Être et Temps. Or deux déchirures y apparaissent précisément en ces moments cruciaux où l’authenticité du Dasein est censée se substituer à l’a priori éthique, puis le temps ekstatique au temps successif.
Mais c’est aussi leur critique sans concession qui nous permet de réamorcer la dimension transcendantale perdue de la phénoménologie, soit, concrètement, la possibilité d’une transcendance verticale, émergeant au sein de la temporalité horizontale à la lumière de la notion de rythme.
Bernard Barsotti, agrégé de philosophie et docteur ès lettres, est professeur de philosophie et chercheur associé aux Archives Husserl de l’École normale supérieure. Il est spécialiste de Husserl (Motivation et Intentionnalité, Classiques Garnier, 2018). Ses recherches portent sur la persistance et la disparition du transcendantal dans la pensée moderne après Kant. Il est également l’auteur d’essais de philosophie esthétique et politique (De la servitude volontaire, Encre marine, 2019).
Bernard BARSOTTI, À priori et temporalité : Sur les deux présupposés d’Être et Temps, PUF, 2022, (Épimethée) 336 p. – ISBN : 978-2-13-084244-6