Ulm-LSH / Jourdan-SHS

L'édition électronique des notes de cours de l'École normale supérieure

Conservées au sein de la cote Ms de la bibliothèque Ulm-Jourdan, les notes de cours de l'ENS réunissent un ensemble de 177 manuscrits, des notes préparatoires ou prises en séance à l’occasion des enseignements de grandes figures de la recherche française du XIX^e siècle : Fustel de Coulanges, Georges Perrot, Paul Vidal de la Blache, Louis Couturat ou encore Jules Michelet. Ce corpus éclaire à la fois l’histoire de l'École et des disciplines de l'époque, aussi bien les humanités (grammaire, histoire, littérature) que les sciences exactes et expérimentales (chimie, mécanique rationnelle, mathématiques).

Parfois annoté ou corrigé par les professeurs, le corpus s'avère extrêmement riche. Dans une perspective génétique, il est possible de tracer le parcours d'un savant d'abord élève et qui, une fois devenu professeur, a donné des conférences. C'est le cas de Louis Couturat dont on possède les notes de cours qu'il a suivis auprès d'Edmond Bouty (Ms 122/1 et Ms 122/2) et les notes de son cours de philosophie des sciences (Ms 128/1, 128/2 et 128/3).

Numérisées en 2015 et accessibles sur la plateforme Internet Archive, les notes de cours sont désormais au cœur d'un projet phare de la bibliothèque en humanités numériques : l'édition électronique de l'ensemble du corpus.

Afin de mieux exploiter le contenu scientifique des textes, au-delà d'une simple publication des images « brutes », le choix a été fait par la bibliothèque de rejoindre la plateforme EMAN qui propose une chaîne éditoriale d'archives et de manuscrits afin d'entamer l'édition du corpus. Le projet « Cours de l'ENS » a pour objectif de mettre à disposition des chercheurs ce matériau de recherche en proposant une première édition du texte de chaque note. Le site doit permettre la consultation des manuscrits numérisés, l'exploration de leur contenu - au travers d'une recherche dans le texte ou par index rendue possible par l'encodage du texte - et la réutilisation de ceux-ci à des fins de recherche ou de valorisation.

Pour ce faire, elle a activement participé au développement du plugin Transcript, un outil qui permet, au sein d'une seule et même interface la saisie et l'encodage au standard xml-TEI de documents pour le logiciel libre Omeka.

Il ne s'agit pas d'une édition scientifique : l'édition de la bibliothèque propose une première approche du texte encodé en xml-TEI. Créé en 1987, le format est aujourd'hui la référence pour l'édition numérique de corpus en SHS. Format largement documenté et connu, il facilite la libre réutilisation et exploitation des transcriptions, ouvrant ainsi la possibilité à une analyse ultérieure des commentaires historiques et des interventions éditoriales par la communauté scientifique. Il garantit également la pérennité des données produites. Outre la restitution fidèle du texte et de sa mise en page, le langage xml-TEI permet un balisage sémantique du texte : indexation des noms de personnes, de lieux ; développement des abréviations et proposition d'une autre orthographe pour certains termes ; signalement des changements de mains, ratures, ajout et remplacements. Les potentialités de la TEI sont immenses : il existe plus de 300 balises permettant de signaler, expliquer, commenter les phénomènes d'écriture. Des modules spécifiques ont été créés pour traiter spécifiquement certains genres littéraires comme le théâtre ou la correspondance.
Les principes d'édition établis par la bibliothèque - bien plus modestes - sont les suivants :

• restitution de la structure physique du texte,
• respect de la mise en forme,
• respect de la graphie originale pour la transcription imitative (orthographe, abréviation),
• modernisation dans la transcription normalisée,
• encodage des noms de lieux et de personnes liés à des référentiels d'autorités (data.bnf.fr, IdRef).

Aujourd'hui, 16 notes sont diffusées sur le site, 3 sont entièrement éditées et 2 sont progressivement transcrites et encodées. Le travail de saisie, de relecture et les difficultés de déchiffrage ont orienté la bibliothèque dans une démarche « work in progress » qui permet une édition au fil de l'eau du corpus, permettant ainsi de donner à voir rapidement le travail déjà effectué. Comme les documents présentés permettent de s'en rendre compte, le déchiffrage et la transcription de chaque texte demande minutie et rigueur. Une véritable chaîne d'édition s'est ainsi organisée, le travail de saisie se doublant d'une relecture afin de s'assurer de l'exactitude du texte, en particulier sur certains contenus tels que le grec ancien ou les formules mathématiques.
Dans une démarche pédagogique, la bibliothèque s'associe au cours d'introduction des humanités numériques de l'ENS pour proposer aux étudiants qui le souhaitent de participer à l'édition numérique de ces notes. Depuis trois ans, la bibliothèque accueille ainsi un à deux étudiants qui sélectionnent une note en fonction de leur appétence ou de leurs propres thématiques de recherches, renforçant ainsi son équipe de transcripteurs. Chaque contribution est mentionnée dans la notice des manuscrits.

Documents présentés

Edmond Bouty (1846-1922)
Cours d'électricité et magnétisme. 1. - [Paris], 1896-1897
Bibliothèque Ulm-LSH, Ms 122/1, f. 176

Edmond Bouty est élève à l'École normale supérieure de 1866 à 1869 , où il suit les conférences de physique de Bertin-Mourot. Ses travaux scientifiques portent principalement sur le magnétisme et l'électricité. En 1884, il devient maître de conférences de physique (3^e année) à l’École normale.
Ces notes de cours ont été prises par Louis Couturat (1868-1914), promotion 1887 l.
Le manuscrit a été entièrement transcrit et encodé sur la plateforme d'édition numérique EMAN.

Le feuillet présenté ici illustre la difficulté à encoder des objets singuliers comme les formules mathématiques ou les schémas. Le choix de la bibliothèque a été d’opter pour le format MathML, plus compatible avec la TEI que LateX.

Henri Weil (1818-1909)
Euripide. - [Sèvres], XIX^e s
Bibliothèque Ulm-LSH, Ms 116, f. 8

Henri Weil, philologue et helléniste, est nommé en 1876 maître de conférences de langue et littérature grecques à l'École normale supérieure, où il enseigne jusqu'en 1892.
Ce document est composé de différents fragments, rassemblés à un moment donné de l'histoire du document. La pagination ou la foliotation indiquée n'est pas d'origine. Elle a été rajoutée pour des raisons de conservation et d'intégrité du document.

Ce manuscrit a été entièrement transcrit et encodé sur la plateforme d’édition numérique EMAN : https://eman-archives.org/coursENS/items/show/22
L’enjeu de l’édition électronique de ce manuscrit était de restituer le plus fidèlement possible la structure du texte particulièrement complexe.

Jules Michelet (1798-1874)
Cours d’histoire du Moyen âge professé par M. Michelet à l'École normale, année scolaire 1830-1831
Bibliothèque Ulm-LSH, Ms 9/4, f. 27v

Jules Michelet est nommé le 3 février 1827 maître de conférences de philosophie et d'histoire à l’École préparatoire, future École normale supérieure.
Ce cours, professé pendant l'année 1830-1831, porte essentiellement sur l'histoire médiévale européenne (Royaume de France, Républiques italiennes, Saint Empire romain germanique, Royaume d'Angleterre, Royaume d'Espagne) événementielle, politique et sociale. Les notes de cours sont divisées en 40 leçons qui contiennent généralement chacune une description géographique du territoire, le récit d'un événement particulier et le fonctionnement politique du royaume ou de la république.

Ce manuscrit est en cours de transcription et d'encodage sur la plateforme d'édition numérique EMAN : https://eman-archives.org/coursENS/items/show/33
Le texte a été saisi mais l’encodage n’est pas encore complet, seule la structuration du texte a été entreprise
(découpages en chapitres et paragraphes du texte).

Charles-Benoît Hase (1780-1864)
Cours de grammaire comparée professé à la Faculté des Lettres de Paris, 1853
Bibliothèque Ulm-LSH, Ms 69, folio 150.

Charles-Benoît Hase, philologue et archéologue français d'origine allemande, est considéré comme le plus grand spécialiste de paléographie grecque de son temps.
Ce manuscrit rassemble les notes du cours de grammaire comparée qu'il professe en 1853 à la Faculté des lettres. La chaire de grammaire comparée de la Sorbonne venait d'être créée pour lui en 1852.
Ce premier cours, centré sur la description et l'origine des langues indo-européennes, est suivi d'une série d'autres (1853-1854, 1854-1855, 1855-1856) qui s'intéressent davantage à la grammaire pure.Les chapitres successifs traitent de l'origine des grandes familles de langues, de leurs divisions dialectales et de la production littéraire afférente. Les langues anciennes concentrent l'attention, mais un long excursus s'intéresse au développement des langues romanes.
Suivant les principes de l'éducation du XIX^e siècle, le latin, le grec et le français font l'objet de retours fréquents. La méthode de Charles-Benoît Hase en revanche illustre une pratique de la linguistique certes dénuée d'outils formels, mais en mesure de percevoir l'ampleur de la tâche de la grammaire comparée indo-européenne et d'en esquisser des lignes directrices.
Les notes de cours ont été compilées par les élèves de troisième année puis lues et corrigées par Charles-Benoît Hase. Le volume ainsi constitué a été transmis à un copiste (anonyme), qui a copié le présent ouvrage.

Il est en cours de transcription et d’encodage sur la plateforme d’édition numérique EMAN : https://eman-archives.org/coursENS/items/show/32