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Ulm-LSH / Jourdan-SHS
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Claude Esteban (1955 l) en dialogue avec les peintres
Arpad Szenes pour Dans le vide qui vient et Jean Bazaine pour Croyant nommerPar bribes.
Et comme le soleil
éprouve la candeur
des herbes
Nous avons habité l’aire
exacte
des mots.
Le Jour à peine écritClaude Esteban (1935 – 2006) est un poète et un universitaire français, agrégé d’espagnol et traducteur, notamment de Gongorà, Quevedo, Garcia Lorca, Paz.
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Passeur de textes, Claude Esteban était aussi un passeur d’images. En effet, dans son travail d’écriture, il s’est autant affronté à la matière du langage verbal qu’à celle du langage pictural et plastique.
En 1958, il rencontre une jeune peintre, Denise Simon, qui deviendra son épouse, et en compagnie de laquelle il découvre le travail de Dubuffet, de Chillida et de Morandi, entre autres. Mais si Claude Esteban écrit sur des artistes qu’ils aiment tous deux et que parfois, ils rencontrent, le couple convient de ne jamais évoquer leur travail respectif hors de la sphère privée.
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Les premiers recueils de Claude Esteban témoignent en creux d’une sociabilité des milieux poétiques et artistiques. Sont publiés successivement : La Saison dévastée, en 1968, avec des pointes sèches de Brigitte Simon, par la galerie Denise Renard, Celle qui ne dort pas, en 1971, avec des aquatintes de Charles Marq, par la Galerie Jacob, ainsi que Croyant nommer, avec des dessins de Jean Bazaine, Comme un sol plus obscur, avec des gravures de Raoul Ubac, par la Galerie Villand et Galanis, et, en 1976, par la galerie Maeght, Dans le vide qui vient, avec des eaux-fortes d’Arpad Szenes, mari de Maria Helena Vieira da Silva.
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Ces différentes expériences de regard et d’écriture seront réunies en un premier recueil, Terres, travaux du cœur, paru en 1979 chez Flammarion, tandis que paraissent trois monographies consacrées, successivement, à Eduardo Chillida, à Raoul Ubac, puis à Pablo Palazuelo.
Par ailleurs, c’est grâce à l’appui d’Aimé Maeght et de René Char que Claude Esteban fonde en 1973 la revue Argile qui continuera pendant huit ans ce dialogue de la poésie avec les peintres et avec les plasticiens. S’il publie encore, dans les années quatre-vingt, d’autres essais sur ses contemporains, comme Traces, figures, traversées. Essais sur la peinture contemporaine (Galilée, 1985) et plus généralement sur les créateurs qui le touchent, comme Le Travail du visible. Essais sur Claude Lorrain, Rembrandt, Murillo, Goya, Malraux (Fourbis, 1992), si, par ailleurs, la peinture lui inspire une suite de narrations poétiques à partir de toiles de Hopper, Soleil dans une pièce vide, parue en 1991 chez Flammarion, ses derniers écrits sur l’art porteront en grande partie sur les périodes anciennes, et particulièrement sur la peinture espagnole, en s’autorisant un prolongement jusqu’à Picasso, comme le montrent Trois Espagnols. Velasquez, Goya, Picasso, et La Dormition du Comte d’Orgaz, publiés par Farrago, respectivement en 2000 et en 2002.
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Bilinguisme, traduction et poésie
Car né d’un père espagnol et d’une mère française, Claude Esteban réunit dans son parcours, tant universitaire que poétique, cette double appartenance qu’il évoquera dans Le Partage des mots, qui allie le sentiment de division, par le partage des langues et par le choix du français, au souci de la réunion, par l’enseignement, par la traduction ou par le dialogue avec les arts. Entré en classes préparatoires à Louis-le-Grand, Claude Esteban intègre l’École normale supérieure en 1955, dont il sort agrégé d’espagnol en 1959. Il part alors à Tanger où il enseigne l’espagnol au lycée Regnault jusqu’à 1961. De retour à Paris en 1962, après son service militaire, il commence une carrière d’enseignant et de chercheur à l’Institut d’études hispaniques de la Sorbonne. Deux rencontres poétiques confirment sa vocation : celle de Jorge Guillén, à Madrid, en 1958, alors qu’il prépare son mémoire de maîtrise, puis celle d’Yves Bonnefoy, en 1962, à Paris. À partir de 1964, il collabore au Mercure de France et à la Nouvelle revue française. Et tout en consacrant des articles et des préfaces de catalogue aux artistes qu’il côtoie, Esteban publie ses premiers recueils de poésie, ainsi qu’Un lieu hors de tout lieu, inspiré par les Géorgiques de Virgile, essai qui vaut pour manifeste poétique. En 1977, il propose chez Gallimard une traduction des parties majeures du grand livre de Guillén, Cantico, accompagnée d’une préface, puis, en 1978, une traduction de Versant et autres poèmes (1960-1968) d’Octavio Paz. Sous le titre de Poèmes parallèles paraît en 1980 une anthologie de traductions à l’importante préface « Traduire », réflexion sur l’exercice de la traduction en poésie. Par ailleurs, il publie, non sans malice, deux ouvrages sous le pseudonyme d’Arthur Silent avec la complicité d’Emmanuel Hocquard. En 1983, Claude Esteban reçoit le prix Mallarmé pour Conjoncture du corps et du jardin et fonde aux éditions Flammarion, la collection « Poésie » qui publiera notamment Jean Tortel, Jean-Luc Sarré, Esther Tellermann ou Yves di Manno – ce dernier prendra sa succession en 1993. Enfin, le poète rassemble également différents textes critiques sur la poésie et sur la traduction sous le titre Critique de la raison poétique (Flammarion, 1987).
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En 1986, Esteban perd accidentellement sa femme Denise : il ne peut plus écrire un mot de poésie en français. Les poèmes que celui-ci compose alors, poèmes du chagrin et du deuil, sont écrits en espagnol. Mais ils seront traduits en italien par son amie Jacqueline Risset à partir de 1987 et paraîtront à Milan : seul détour possible et acceptable avant l’ultime traduction en français pour Flammarion sous le titre Élégie de la mort violente.
Il publiera ensuite Sept jours d’hier en 1993, sorte de journal poétique du deuil, et Sur la dernière lande, que traverse la figure du roi Lear, en 1997.
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Claude Esteban reçoit finalement le Grand prix de poésie de la Société des gens de lettres pour l’ensemble de son œuvre en 1997, puis le prix Goncourt de la poésie après la parution de Morceaux de ciel, presque rien, en 2001. Peu avant sa mort, une anthologie de ses poèmes est présentée par Gallimard, Le Jour à peine écrit (1967-1992), mais son dernier ouvrage, sorte de testament poétique, La Mort à distance, paraîtra un an plus tard, en 2007.
Exposition réalisée par Marie Frisson, A. T. E. R. en littérature française (ENS / Sorbonne Nouvelle)
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Liste des documents présentés
- Claude Esteban (1935-2006) et Arpad Szenes (1897-1985), Dans le vide qui vient, Paris, Maeght, Coll. « Écritures » n° 6, 1976. Bibliothèque Ulm-LSH, L F p 845 8° ;
Exemplaire hors commerce portant un envoi manuscrit de l’auteur « Pour la bibliothèque de l’École / Claude Esteban » ; cet ouvrage est le quatrième recueil que publie Claude Esteban en dialogue avec Arpad Szenes qu’il a rencontré dans le cadre de la Galerie Jacob ; - René Char (1907-1988), Seuls demeurent, Paris, Gallimard, 1945. Bibliothèque Ulm-LSH, L F p 105 4° ;
Exemplaire portant un envoi manuscrit de l’auteur : « exemplaire destiné à la Bibliothèque de l’Ecole Normale Supérieure / René Char » ; - Claude Esteban (1935-2006) et Jean Bazaine (1904-2001), Croyant nommer, Paris, Galanis, Coll. « Écritures » n° 5, 1971. Bibliothèque Ulm-LSH, L F p 615 12° ;
Cet ouvrage est le troisième recueil que publie Claude Esteban en dialogue avec Jean Bazaine, rencontré par l’intermédiaire du couple Simon-Marq ; - Argile, Paris, Maeght, n° 1, 7, 1973-1975. Bibliothèque Ulm-LSH, en traitement. Don de Madame Christine Jouishomme, janvier 2021 ;
Argile, Paris, Maeght, n° 15, 1978. Prêt de Monsieur Roland Béhar ;
À la demande d’Aimé Maeght, Claude Esteban fonde la revue Argile en 1973 qui succède ainsi à la revue L’Ephémère et il la dirige jusqu’en 1981. Avec Jean-Claude Schneider, il veille à publier tant la poésie française que la poésie étrangère traduite par les poètes français, tout en ménageant une place à la peinture contemporaine ; - René Char (1907-1988), « Des dessins de Denise Esteban », Denise Esteban : dessins, carton d’invitation, Paris, Galerie Jean Peyrole, mai-juin 1985. Prêt de Corinne et Bernard Simon pour les Archives Denise Esteban ;
- Denise Esteban (1925-1986). Denise Esteban, peintre, et les poètes, catalogue d’exposition, Villeneuve-lès-Avignon, juillet 1987. Prêt de Corinne et Bernard Simon pour les Archives Denise Esteban ;
Cette exposition a été organisée par Claude Esteban en hommage à Denise Esteban, un an après sa mort, dans la chartreuse de Villeneuve-lès-Avignon avec l’aide de Marie et Gil Jouanard. Cette exposition réunissait différents aspects de l’œuvre, mais également des hommages des amis poètes et des amis artistes. Elle était également accompagnée d’une programmation de lectures par certains poètes et par des comédiens.
Photographies
- Claude et Denise Esteban, rue Daguerre, 1965. Image fournie par Corinne et Bernard Simon pour les Archives Denise Esteban ;
- Claude Esteban, Munich, 2004. Photographie Isolde Ohlbaum. Prêt de Christine Jouishomme pour les Archives Claude Esteban ;
- Claude Esteban, Ispahan, 2004. Photographie Jean-Baptiste Para. Prêt de Christine Jouishomme pour les Archives Claude Esteban ;
- Claude Esteban, Colloque Jorge Luis Borges, Buenos Aires, 1997. Prêt de Christine Jouishomme pour les Archives Claude Esteban ;
- Claude Esteban et René Char, Lacoste, 1974. Image fournie par Corinne et Bernard Simon pour les Archives Denise Esteban ;
- Claude et Denise Esteban, Anne-Marie et Philippe Jaccottet, Yves Bonnefoy et Lucy Vines, Lacoste, 1986. Image fournie par Corinne et Bernard Simon pour les Archives Denise Esteban ;
- Claude Esteban et Jacques Roubaud, Quatrième Rencontre de la poésie contemporaine, Metz, 1988. Image fournie par Christine Jouishomme pour les Archives Claude Esteban ;
- Claude Esteban, Jacques Dupin, Michel Deguy, Paris, 1998. Image fournie par Christine Dupin pour les Archives Jacques Dupin.
Remerciements
Cette présentation peut avoir lieu grâce aux généreux dons, prêts et envois de reproductions de photographies par les proches de Claude et Denise Esteban : nous remercions tout particulièrement Christine Jouishomme, Corinne et Bernard Simon, Christine Dupin, Catherine Delot (Musée des Beaux-arts de Reims), Roland Béhar, Xavier Bruel, Jean-Baptiste Para et Isolde Ohlbaum.
Bibliographie
Claude Esteban - bibliographie - janvier 2021
Présentation réalisée en janvier 2021 par Marie Frisson
- Claude Esteban (1935-2006) et Arpad Szenes (1897-1985), Dans le vide qui vient, Paris, Maeght, Coll. « Écritures » n° 6, 1976. Bibliothèque Ulm-LSH, L F p 845 8° ;